Ô temps inestimable, ta valeur imprécise
J'ai la nostalgie de tes murs silencieux
Eux, qui veillaient tranquilles sur mes heures heureuses :
Vieilles amies perdues, pas flâneurs, indécis
Puisque l'on ne te perd qu'en te perdant deux fois
La première te quitte, la seconde t'oublie
Que ne puis-je faire du temps ce cycle fini
Où en marchant plus vite j'irai plus vite à toi
Le regret est chimère amertume et délice
Le souvenir malin, la mémoire trompeuse
Le présent ne vit plus quand la vie désireuse
S'attache à l'ancre lourde d'un hier plus propice
Car je vois dans un rêve d'une vive insolence
Ton sourire qui brille tel l'ultime horizon
Je devine de ta sphère les plus vertes saisons
Et j'y noie mes désirs comme dernière évidence
Ô temps inestimable, ta valeur imprécise
J'ai la nostalgie de tes murs silencieux !
Las, le jour à peine né de mes souvenirs
N'est plus qu'un labyrinthe aux sinistres dédales
Une danse macabre, une valse infernale
Sarcasmes violents d'un passé à mourir
Dans les limbes nouvelles de tombeaux éphémères
Je devinerai ton ombre au travers des brouillards
Et le temps figerait dans les brumes du soir
Sa barque aux couleurs fauves sur sa noire rivière
Ainsi s'achèverait sa fuite inexorable
Dans le silence limpide d'une nuit sans lumière
Je te verrai debout au milieu des déserts
Dressé comme un géant enfanté par les sables
Eux qui veillaient tranquilles sur mes heures heureuses
Vieilles amies perdues, pas flâneurs, indécis !